Salut mon ami,
Désolé de ne pas t’avoir écrit plus tôt, mais j’étais bien occupé ces dernières semaines. Tu m’as demandé comment j’allais et je vais te répondre franchement. Je suis un peu triste. Pourquoi ? Je me suis aperçu que je suis une grande personne et cela ne me plaît pas. Oui, je sais, c’est une bêtise, mais attends, écoute-moi !
Tu connais le livre Le Petit Prince ? Je présume que tu l’as lu et que tu te souviens bien de ce qui s’y passe. On m’a dit que c’était un livre pour les enfants, et j’ai eu cette impression pendant longtemps. Mais en le lisant, je me suis trouvé très ému, surtout à propos d’une petite partie. C’est la partie où le petit prince parle de son expérience avec les grandes personnes. Il a dit qu’il avait rencontré beaucoup de grandes personnes, qu’il les avait vues de très près et que son opinion d’elles n’était pas très bonne. J’ai la même impression, et non seulement à cause des autres, mais aussi à cause de moi-même. Je me suis aperçu qu’être une grande personne signifie être une personne misérable, malheureuse. Il y a de petits moments où l’on est heureux, mais la plupart du temps, c’est toujours la même chose.
On veut ce qu’on n’a pas, on est toujours dans cette chasse du bonheur, dans cette chasse de la gloire. On est toujours occupé par des choses insignifiantes, et on a rarement le temps et la patience pour les autres. C’est l’argent et le succès qui nous préoccupent, et tout ce à quoi on aspire, c’est la reconnaissance des autres. On dépend tellement des choses matérielles et des opinions des autres qu’il me semble que ce ne sont pas nous qui contrôlons notre vie.
Et quant à la haine, pourquoi avons-nous ce besoin de détester les autres et de débattre ? Les enfants n’ont pas de haine, ils ne la connaissent pas. Alors je me demande vraiment à quel moment de notre vie on échange l’amour pour les jeux contre l’amour pour la guerre. À quel moment on remplace l’amour pour les autres par la haine de tout ce qui est différent et étrange ? Je ne sais pas pourquoi on est si enclin à distinguer les autres par la religion, par la nationalité ou par la race. À la fin, on est tous pareils, on est tout simplement des gens.
Est-ce que c’est l’éducation qui nous rend comme ça, ou est-ce que c’est dans la nature de l’homme de devenir comme ça ? Je ne sais pas. Mais c’est pourquoi je me demande parfois si l’on doit grandir, pourquoi est-ce qu’on doit devenir de grandes personnes. Le monde serait meilleur si on restait des enfants dans le cœur.
Alors c’est pourquoi j’ai décidé de changer de vie, de prendre du recul. C’est facile de se perdre dans ce monde matérialiste et d’oublier les valeurs essentielles et importantes. Alors il faut ralentir le pas, profiter du moment présent et être content de ce qu’on possède. La vie est une chose miraculeuse et il faut l’apprécier tout le temps.
J’espère, mon ami, que je ne t’ai pas trop fatigué avec tout cela. Je pense que tu le comprendras et j’ai hâte de lire ta réponse. Dis-moi, est-ce que le monde est comme je l’ai écrit, où est-ce moi qui suis pessimiste ?
À bientôt !
L’auteur
Crédits musique : Bumbler by Andy G. Cohen ; Axletree – Quoin (feat. Andrew Freidin) ; Lasonothèque.org
Montage audio : Marion Roussey